dimanche 28 septembre 2008

La mort d'Emile Zola: accident ou assassinat?

Le 29 septembre 1902, de retour à Paris après avoir passé l'été à Médan, Émile Zola et son épouse Alexandrine sont asphyxiés dans la nuit par l’oxyde de carbone dégagé par la cheminée de sa chambre qui, officiellement, «tirait mal». A l’arrivée des médecins, il n'y a plus rien à faire, Émile Zola décède officiellement à 10:00 du matin. En revanche, son épouse survit. Cette mort serait accidentelle, mais étant donné le nombre d’ennemis qu’avait pu se faire Zola (notamment chez les anti-dreyfusards) la thèse de l’assassinat ou de la « malveillance ayant mal tourné» n’a jamais été totalement écartée. Citons ses ennemis : Jules Guérin dirigeant de la Ligue antisémite : «Mort à Zola !, Zola à la potence !, Mort aux Juifs !». La Croix (qui a changé depuis, heureusement), quotidien catholique, lui consacre un éditorial intitulé : «Etripez-le !». L’auteur de «J’Accuse … !» publié en 1898 est devenu « l’homme à abattre » chez les antisémites et ultranationalistes. Pas étonnant, dans ces conditions, que des extrémistes antisémites soient tentés de passer à l'actes. Après sa mort, une enquête de police est réalisée mais n’aboutit à aucune conclusion probante. Les rapports des experts laissaient pourtant ouverte cette possibilité. Le gouvernement voulait-il éviter une guerre civile en cautionnant la thèse de l’accident?

Ci-dessous, l'article "J'Accuse...!" publié dans L'Aurore.

En 1953, Jean Bledel recueille le témoignage inattendu d’un certains Pierre Haquin qui parle ouvertement pour la première fois d’assassinat. Dans un livre paru aux éditions Flammarion et intitulé Zola assassiné, Pierre Bedel relate sa rencontre avec Pierre Haquin, qui avait recueilli les propos de son ami Henri Buronfosse, originaire de Sarcelles. Celui-ci, quelques semaines seulement avant sa mort, décide de lui raconter comment «ils» avaient éliminé Zola. Sans toutefois parler d’éventuels commanditaires ni d’autres couvreurs qui l’ont vraisemblablement aidé à boucher et ensuite à déboucher la fameuse cheminée de la chambre d’Emile Zola.
«A la fin du mois de septembre 1902, il y avait des travaux de réfection de la toiture d’une maison voisine de l’immeuble où habitait Zola. Quand nous avons su qu’il allait rentrer de Médan à Paris, selon son habitude, nous sommes montés sur le toit voisin et nous avons bouché la cheminée en question. Et le lendemain de son retour, le matin tôt, nous sommes remontés sur le toit et nous avons débouché la cheminée. Personne ne nous a remarqués ». Il faut préciser qu’Henri Buronfonsse était un militant d’extrême droite.
L’émotion est immense à l’annonce de la mort de l’auteur de «L’Assomoir» entre autre. La presse nationaliste et antisémite est aux anges. L'émotion gagne l'étranger où de nombreuses cérémonies ont lieu en mémoire de l'écrivain français, et les presses germaniques, britanniques, américaines s'en font largement l'écho. L'hommage est international. Lors des obsèques, Anatole France, qui avait insisté pour évoquer toutes les facettes de l'écrivain, y compris ses combats pour la justice, lit sa célèbre péroraison à l'auteur de «J'Accuse...!»: «Il fut un moment de la conscience humaine».
Les cendres de Zola ont été transférées au Panthéon de Paris le 4 juin 1908. À la fin de la cérémonie au Panthéon, un journaliste anti-dreyfusard, Louis Grégori, ouvre le feu avec un révolver sur Alfred Dreyfus, qui n'est que légèrement blessé au bras.
Ci-dessus, une caricature représentant un Prussien caché derrière un juif portant le masque de Zola
Ci-dessus, Emile Zola sur son lit de mort